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BIRDMAN ou la surprenante vertu du sacrifice spirituel

Publié le par Shelby le Magnifik (Joe)

BIRDMAN ou la surprenante vertu du sacrifice spirituel

 

Alejandro González Iñárritu est un réalisateur et producteur mexicain, né le 15 Août 1963 à Mexico au Mexique

Inarritu souhaite se lancer dans l'écriture d'un scénario, sa rencontre avec Guillermo Arriaga, qui sera ensuite un de ses fidèles collaborateurs, se révèle décisive. Après deux ans d'écriture, il tourne son premier long-métrage, le virtuose Amour Chiennes en 2000 , une peinture réaliste et décapante de Mexico qui suit les destins parallèles d'une dizaine de personnages réunis par un ac cident de voiture. Inarritu fait une entrée fracassante dans le paysage cinématographique avec ce film couvert de prix dans les festivals internationaux, et nommé à l'Oscar du Meilleur film étranger.

Il décide de réaliser son deuxième long métrage en 2003, 21 Grammes, cette fois produit par un studio américain il réunit une distribution internationale; pour ce film: Sean Penn, Naomi Watts, Benicio Del Toro.

Avec son troisième long métrage, Babel, récompensé du prix de la mise en scène au festival de Cannes 2006, le réalisateur confirme son goût pour le récit éclaté. Babel se passe dans quatre pays avec quatre communautés différentes, Maroc, Etats-Unis, Mexique et Japon. L’angle de travail d’Alejandro Gonzalez Iñarritu est de raconter les quatre histoires qui composent la trame du récit depuis le point de vue des personnages. Le casting international réunit entre autres: Brad Pitt et Cate Blanchet, et révèle de nouveaux talents.

En 2010. Il revient la même année aux manettes de son quatrième film Biutiful, intense portrait d'un homme en chute libre porté par un Javier Bardem au sommet de son art (Prix d'Interprétation ex-aequo à Cannes).

 

En 2015, le cinéaste mexicain présente son nouveau long métrage pour lequel il est récompensé de l'oscar du meilleur réalisateur : BIRDMAN.  

 

 

Synopsis : À l’époque où il incarnait un célèbre super-héros, Riggan Thomson était mondialement connu. Mais de cette célébrité il ne reste plus grand-chose, et il tente aujourd’hui de monter une pièce de théâtre à Broadway dans l’espoir de renouer avec sa gloire perdue. Durant les quelques jours qui précèdent la première, il va devoir tout affronter : sa famille et ses proches, son passé, ses rêves et son ego…
S’il s’en sort, le rideau a une chance de s’ouvrir...

 

Inaritu, à travers son film, BIRDMAN crée un OVNI cinématographique, pratiquement jamais vu jusqu'ici. En effet, sous fond de comédie dramatique, le cinéaste nous livre un portrait de la préparation d'une pièce de théâtre, avec tout ce que cela implique, les difficultés de casting de comédiens, les imprévus, les ratages. 

Le théâtre est un cirque où les acteurs se prennent pour des orphelins. La féérie de l’espace leur permet d’y croire. Parfois ils en meurent. Parfois ils en rient. Inarritu a décidé d’en rire même si sa fable est impitoyable pour ce peuple de clowns jamais heureux. Sa mise en scène fluide, faite d'un unique plan séquence durant tout le film (qui en fait est un subtil montage de 3 plans séquence, représentant les 3 répétitions avant le grand saut, à savoir 3 représentations en avant première face à des critiques et un certain public. Ces  plans séquence de haute voltige, ne cessent de prouver à quel point sa caméra peut être virtuose, filant au train des personnages comme un mouchard, voletant comme un drone et longeant les vieux couloirs du St James Theatre à Times Square. Le film est un huis clos entièrement tourné à New York même si on y voit peu la ville et que les buildings visant le ciel y figurent davantage sous forme de décors.

 

Le faux plan séquence unique qui donne un ton d'immersion au public, est , en soi, un procédé assez novateur car jamais revu depuis "la corde" d'Hitchcock, mais il donne aussi la sensation de courir après sa destinée comme le fait Riggan Thompson (interprêté par Michael Keaton), le rythme constant de la batterie appuyé au moment des péripéties de l'intrigue du film, donne toute son essence et sz justification surtout lorsqu'on suit le parcours de Riggan ,comme si c'était le battement de la bombe à retardement de Rigan qui allait exploser, (ou comme si nous suivions le rythme de son coeur). La photographie de l'excellent Emmanuel Lubezki est juste splendide, et convaincante de réalisme. 

 

 

Riggan Thompson, dont la carrière par le passé fut couronné de succès grâce notamment à 3 films de Super-Héros Blockbuster, dans lesquels il y jouait le personnage de Birdman (Homme-oiseau aux supers pouvoirs). Malheureusement, de cette gloire passée, Riggan en a perdu son identité. Les gens ne le reconnaissent plus que sous les traits de Birdman, et non comme celui de Riggan Thompson, l'acteur qui endossait le costume. 

 

 

A 60 ans, Riggan Thompson, sa carrière derrière lui décide de monter une pièce de Théâtre adaptation d'une nouvelle de Raymond Carver "Parlez moi d'Amour". 

 

 

Inaritu rend d'ailleurs un grand hommage à Carver en exposant au début de son film une citation de ce dernier, dont l'expression a été gravé sur sa pierre tombale 

 

Je cite : "Et vous avez obtenu ce que vous vouliez de cette vie, malgré tout? 

En effet. et ce n'

Et qu'est ce que vous vouliez ? 

Me rappeler à moi-même de m'aimer, De me sentir aimer sur terre. "

 

Inaritu pose avec cette citation de Carver directement les jalons de ce que sera son film, et ce n'est pas pour rien que Riggan Thompson a choisi la pièce "Parlez moi d'Amour" de Carver, pour se lancer dans le théâtre.

Riggan, comme la plupart des comédiens et acteurs, font partis de ces gens qui ont un énorme besoin de reconnaissance. En général, ils ne s'aiment pas eux même, et seul leur prestation sur scène (pour le théâtre) ou en plateau (pour les acteurs), leur permet de se sentir vivant. Ceci est tout l'image de Mike Shinner (interprêté par le talenteux Edward Norton), un excellent comédien qui ne se sent réellement vivant que sur scène, mais en dehors de ces scènes à jouer, il n'apprécie pas la vie. Il estime que c'est là qu'il joue vraiment la comédie, usant de manipulations, menteur, et cynique pour parvenir à ses fins. Il est égocentrique et ne prend pas en considération l'avis des autres. Il prétend ne pas rechercher la popularité, à contrario de Riggan définissant "la popularité comme la cousine racoleuse du prestige".

 

 

Mais c'est ce prestige que Mike recherche, tout comme Thompson. Il est le portrait du Riggan Thompson lorsque ce dernier était plus jeune. Ambitieux, narcissique, egocentrique et méprisable. 

 

Mike et Riggan vont d'ailleurs rentrer dans une sorte de compétiton à celui qui obtiendra la notoriété sous les feux des projecteurs, et pour cela ils créent tout deux, des situations improbables. Entre le "Gin" et la "Trique" sur scène Shanner est excécrable (Il veut limite violer sa compagne sur scène pour faire "plus vrai"), son ambiition le submerge, il se sent incompris et partage ses moments de doute avec Sam la fille de Riggan, qui est peut être la seule personne qui pourrait lui ressembler, car n'ayant peur de rien, paraissant inexistante elle aime jouer de l'adrénaline sur les toits du théâtre, à se tenir au bord de la corniche, prête à sauter (effet psychique de Birdman peut être). Jeu de provocation qu'affectionne Shanner, puisque jouant à des "actions vérités", ce dernier brisera sa faille d'être amorale, et entamera un jeu de séduction concluant. 

 

 

Il est interessant d'ailleurs de voir que tous les protagonistes du film, ont ce besoin "d'exister" sur scène, reflet implacable de leur triste vie dépressive dont ils sont les dommages collatéraux d'un système Hollywoodien, Théâtral, des critiques et maisons de production qui les attendent aux tournants et surtout de l'appréciation et des "caprices" du public, qui a besoin de "sensationnalisme" pour se divertir. Ce public qui à l'instar, de Sam (Emma Stone) la fille de Riggan, ne possède que "l'unique ambition d'exister sur la toile" pour reprendre les termes de Riggan à sa fille. Le public d'aujourd'hui est beaucoup plus friand du buzz qui peut être créer par un événement que par la prouesse artistique d'un comédien ou d'un acteur. SPOILER : La scène où Riggan est coincé dehors en slip, devant absolument rejoindre le St James Theater, même si il doit passer devant les gens qui sont dans la file d'attente pour rentrer, se ridiculisant bien malgré lui, en dénote fortement. Riggan court encore après une chimère qui n'existe plus pour lui, l'admiration de son talent. Mais c'est encore une course veine. Le public se souciant plus de poster sur Twitter, facebook ou autres réseaux sociaux la photo ou vidéo de Riggan Thompson, le mythique Birdman, en train de courir dans la rue en slip. 

 

 

Cette oppostion entre la vision de Sam et celle de son père est une nuance sur le culte de la célébrité. La nuance est de taille, et résume parfaitment l’époque et son culte de l’image. Culte de la jeunesse aussi. Birdman entend son double lui murmurer qu’à 60 ans, il a le droit de renaître comme un Phénix. 

D'aiileurs la dispute entre Sam et son père en coulisse démontre bien qu'elle a parfaitement cerné son père, un être égocentrique, excécrable, éternel insatisfait, passant à côté de vrais choses importantes de la vie (la famille, l'amitié) créant inévitablement des dommages collatéraux dans leurs environnements proches, cherchant en permanence l'admiration à tout prix, perdue ou pas pour leur prestation d'acteurs ou de comédiens à une ère où les réseaux sociaux polluent et innondent la planète s'arrêtant sur le buzz. 

Riggan confond l'amour et l'admiration, il ne sait pas faire la différence. Sam le comprend et lui fait remarquer : "Pourquoi tu fais ça ? Tu l'as eu ta gloire. Tu ne fais pas ça pour l'amour du 7ème art, tu fais ça pour rester dans la course.... Tu te prends pour qui ? Tu détestes les bloggers, tu te moques de Twitter, et tu monte une pièce de théâtre d'une nouvelle de Carver d'il y a plus de 60 ans, dont tout le monde se fout, et tu fais ça parce que tu as trop la trouille d'être comme tout le monde, La trouille de ne pas compter. Et c'est la vérité tu es insignifiant, tu n'as aucune importance". 

 

 

Sam délaissé pour compte depuis son enfance, sous sa carapace de fille cherchant elle aussi à exister à travers la prise de drogue, afin de se faire remarquer de son père, et malgré tout le caractère aigri qu'elle peut avoir, a une vision logique des choses en ce sens, qu'elle voit la déchéance mentale de Riggan, et l'existence de Riggan Thomson prêt à tout et paralysé par la peur, dans une quête pourtant simple, qui n'est autre que celle de toute personne : exister.

 

A son image, et celle de Thompson et Shanner, tous les protagonistes du film, ne recherche qu'une notion existentielle éphémère de briller telle une étoile filante sous les feux des projecteurs, ou d'en tirer parti. Mais la rançon de la gloire est difficile, et le retour à la réalité est amère. Lesley (Naomi Watts) n’en finit pas d’espérer une reconnaissance. « J’attends toujours qu’on me dise que j’ai réussi », lâche-t-elle en larmes à sa partenaire. Laura (Andrea Riseborough) une reconnaissance de Riggan et d'avoir un enfant, Brandon (le meilleur ami de Riggan, son manager et avocat) (interprêté par Zach Galifianakis dans un rôle à contre emploi), ne recherche que l'avidité du succès de Riggan pour être reconnu auprès des grands studios de production, c'est un être cupide et sans morale. 

 

 

Seule l'ex femme de Riggan, qui connaît son ambition démesurée pour l'admiration et la célébrité, est rationnelle et s'inquiète de l'état de santé de Riggant. Inaritu a d'ailleurs fait une opposition interessante dans le sens où excepté la scène finale, il n'y a que 2 scènes où Riggan et Sylvia (Amy Ryan) discutent.

Dans la première, qui correspond à une partie de la mentalité de Riggan toujours vaniteux et égocentrique, elle lui demande de prendre soin de Sam qui lui sert d'assistante. Riggan rétorque en racontant une anecdote sur le fait que lorsqu'il était encore célèbre, il y avait eu des turbulences en avion, et Riggan se préoccupait plus de savoir comment réagirait Sam si elle savait que Georges Clooney était dans l'avion, et qu'il ferait les gros titres du crash et pas lui. Ici, Riggan démontre bien que son égocentrisme est à son paroxysme car il ne comprend pas ce que son ex femme, essaye de tenter de lui expliquer. Il lui démontre que pour lui, seule la notoriété compte au détriment de tout. 

A contrario, dans la deuxième scène où il discute et où il entreprend ce qu'il a décidé et compris par sa dualité du Birdman, dont j'expliquerais plus bas les tenants et aboutissants, il lui explique 

son remord d'être passé à côté sa vraie vie, et de les avoir fait souffir elle et Sam, trop orgueilleux pour reconnaître à l'époque ses échecs personnels et professionnels. Il lui raconte l'histoire des méduses qui l'avaient piqué quand il a tenté de se noyer après l'avoir trompé, et ce symbolisme est extrêmement important et j'y reviendrais.

 

 

Car au fond, l'histoire de Riggan Thompson fait parfaitement écho, avec la pièce de Théâtre qu'il a monté et produite, reprenant la nouvelle de Carver 'Parlez moi d'Amour". Au début, lors des premières répétitions, la tirade de Shanner à propos du personnage d'Eddie en quête existentielle d'amour est "L'amour est absolue, dans cette sorte d'amour on essaie pas de tuer l'autre". C'est pourtant ce que fait Riggan en dénigrant en permanence tous ses collaborateurs sa famille, ses amis, et le milieu du Showbizz. Son psyché est extrêment compliqué. Il doute, et se perd dans les méandres de son subconcient (symbolisme représenté par les coulisses du Théâtre, où au départ, il tiennent à plusieurs dans les couloirs se donnant la réplique, mais où lorsqu'il est en proie au doute, à l'inquiétude de son succès sur scène, les couloirs sont devenus étroits et ne laissent plus de place que pour lui, et sa propre torpitude). La réplique se poursuit par : Le jour où elle l'a plaquée, il s'est tirée une balle dans la bouche, mais là aussi il s'est loupé" et là comble de l'ironie cela fait un effet mirroir de ce qu'entreprendra Riggan sur scène, à savoir se suicider sur scène, pour atteindre la consécration car, il a pris conscience d'un nécessaire changement obligatoire ne pouvant passer autrement pour satisfaire les caprices du public et de la critique, et réobtenir une reconnaissance de son talent, que par le suicide sur scène.

D'ailleurs, tout cela est la thémathique centrale du film au delà de son esthétisme parfait et de sa mise en scène subtile, à savoir "l'Amour". De quoi est ce qu'on parle lorsqu'on parle d'Amour ? Pourquoi est ce que je dois quémander pour avoir un peu d'amour ? Ces 2 questions sont posés par le personnage d'Eddie via Riggan dans la pièce de théâtre, mais elles font aussi écho à la quête d'estime de soi de Riggan. 

 

 

Inaritu va même beaucoup plus loin lorsqu'il définit la critique de tout un système qu'est le monde du Show-business, il critique les acteurs via l'image de Tabitha Dickinson, la critique presse du Times qui fait la pluie et le beau temps, sur le succès ou non d'une pièce de théâtre,  (voire même d'un film) définissant les acteurs et comédiens comme des "êtres suffisants, pourri-gâtés, égoïstes, complètement incultes, qui sans travailler, sans aucune préparation, osent faire profession d'être artiste, et qui accordent entre eux des récompenses en or, à leur film pornographique, en fonction du nombre d'entrées du Week-End (dénonciation du Box-office illusoire), Mais ici, on est au théâtre, et on arrive pas comme ça avec la prétention d'écrire, mettre en scène et jouer une scène d'autopromotion sans m'avoir demander auparavant ce que J'en pense". 

 

En réponse à ceci comme un effet ping-pong, Inaritu à travers Riggan dénonce aussi le système fallacieux des critiques presse de théatre et cinéma. En lisant une critique de Tabitha, il évoque les termes novices, inconsistent et mineur, et les calomnient d'étiquettes. Inaritu dénonce le mode des critiques comme collant des étiquettes (comme on enfilerait des perles et c'est simplement de la paresse). Riggan exprimant " Pas un instant, vous ne parlez de la technique, pas un instant vous ne parlez de la structure, pas un instant vous ne parlez des intentions. Vous émettez des opinions merdiques appuyées par des comparaisons encore plus merdiques et malhonnêtes. Et voilà vous publiez 2 petits paragraphes sans aucun effort, et sans que ceci ne vous ai rien coûté. Vous ne risquez rien, rien. Mais là, vous êtes facee à un acteur, moi en montant cette pièce j'ai pris tous les risques. Alors vous allez ramasser votre critique de merde pleines de haine, et d'animosité écrite avec un balai à chiottes". Inaritu dénonçant ainsi les facilités de critiques qui sont souvent considérés comme des réalisateurs ou acteurs râtés, qui ne s'appuient en effet pas assez sur la vraie technique du cinéma, ou du théâtre à savoir de l'art. 

 

 

Mais Riggan n'est pas un acteur, c'est une célébrité et ce n'est pas la même chose. 

 

Et cela prend tout son sens avec la note que Riggan tient en permanence dans sa loge, sur son mirroir : "A thing is a thing, not what is said of that thing". trad : une chose est une chose. Non ce qui est dit de cette chose.

 

Riggan Thompson est un homme  fragile, tendu et passionné souffrant de schizophrénie, entendant et nous faisant partager son délire, la voix off de Birdman, le super héros homme oiseau, qui n'arrête pas de lui dire ses vérités à savoir que sa pièce est mauvaise, mal interprêtée, et que ce qu'attend le public c'est un film plein d'actions, de sang et d'effets spéciaux, au détriment d'un scénario de qualité qu'importe, le public veut du blockbuster, plutôt qu'une comédie drame dépressif. Inaritu fait ici une dénonciation du public qui ne demande plus qu'à consommer à outrance, dans l'ère du consumérisme à son paroxysme incitant les maisons de production à ne produire que des films formatés à scénario souvent creux mais extrèmement rentables (car le public ne veut pas se fatiguer à chercher à comprendre ou à réfléchir, il s'est habitué à ce qu'on lui prémâche absolument tout), par conséquent la dénonciation des blockbusters, la quête de l'estime de soi, à l'image d'un Rigan/Keaton ou d'un Norton/Shanner qui se sentent chacun en décalé avec la réalité, et qui correspond au reflet du mirroir de ces 2 acteurs de talents (discrets mais efficaces dans leur filmographie réelle). Les super-héros en prennent pour leur grades, montrant un Spiderman paradant, un Iron Man se faisant démonter par un Transformers, expliquant même lorsque Riggan recherche rapidement un nouveau comédien/acteur vouloir Michael Fassbender (qui ne peut pas car tournant un préquel de X-Men), ou un Jeremy Renner (ne pouvant pas non plus car tournant dans un Avengers), ou encore Robert Downey Junior ou Ryan Gosling, démontrant bien que l'industrie cinématographique accorde trop d'importances à la rentabilité, cédant au caprice d'un public qui ne fait que cautionner des budgets faramineux des maisons de production pour des blockbuster, sans grande intelligence, plutôt que de favoriser des films d'auteur.

 

 

 

D'ailleurs le choix de Michael Keaton n'est pas anodin pour Inaritu car nous pouvons facilement établir le parallèle entre la carrière de Keaton discret voire ignorée de la machine Hollywoodienne depuis Batman le défi,à l'image de Riggan et de son Birdman. 

 

 

Riggan est persuadé de posséder des super pouvoirs, toute les visions que nous avons de sa télékinésie, à l'apparition du Birdman comme Némesis pour le conseiller. Le Birdman fait partie de sa schizophrénie mais c'est aussi une partie de sa conscience qui lui fait admettre la vérité. BIRDMAN lui conseille d'ailleurs, 

 

 

 

 

La comparaison entre Birdman et Icare, qui s'est brulé les ailes en voulant atteindre la liberté et les cieux, et est retombé pour mourrir, est d'ailleurs subtilement évoqué. D'abord lors de son interview par des journalistes, Riggan tente d'évoquer que Birdman tout comme Icare... lorsqu'il est interrompu par une attachée de presse sur une question stupide d'injection de spermes de porcelet qu'aurait pris Riggan. Ensuite, Inaritu met subtilement l'accent sur le fait qu'il ne faut pas l'évoquer. 

Mais lorsque le Birdman, finit par lui parler lorsqu'il a son hallucination, persuadé de voler alors qu'il est simplement ramené en taxi, le Birdman lui explique qu'il doit redonner du sensationnel. "Il faut que ça se termine Riggan, sur un coup d'éclat, un feu d'artifice, un sacrifice, Icare. Tu en es capable. Tu es un Dieu". 

 

 

La boucle est bouclée, Riggan parle à sa femme des méduses, une lueur spéciale dans ses yeux le semble transformer, sûr de lui. Il sait qu'il doit accomplir sa fin magistrale, par le sacrifice de son âme. 

 

Dès lors, Inaritu donne la dimension la plus tragique de son film, 

Prenant à coeur le rôle d'Eddie, il comprend enfin le sens de sa dernière tirade " J'existe pas, je suis même pas là. Je suis pas là." et après avoir pointé du public son réel pistolet (et non plus son gadget) il se tire une balle dans la tête. 

 

 

Sauf, qu'à l'image de son personnage d'Eddie il s'est loupé, et s'est juste tirer dans le nez. Encore un écho à la nouvelle de Carver. 

 



Riggan est devenu le Birdman, la voix qui l'a si longtemps torturé, dans sa schizophrénie, mais qui a été la seule à lui faire prendre conscience que pour s'élever au summum tel Icare pour atteindre les cieux de la consécration et de l'admiration, il lui fallait se sacrifier. Défiguré, à l'hôpital Rigan retrouve enfin sa popularité pour ce qu'il a accompli (et non la pièce en elle même) sur scène, par sa mort, et il est possédé complètement par le Birdman. Il a créé ce que les médias vont appeler le superéalisme. Il a pris conscience de l'importance de l'amour qu'il a toujours cherché dans son cynisme, et son égocentrisme, mais qu'il a confondu avec de l'admiration.
Tel Icare qui se brûle les ailes en touchant le soleil, et retombe comme une comète, le symbolisme des méduses échouées sur la plage, et qui était en plan subliminale au début du film prend tout son sens. En effet, au niveau symbolisme la 
méduse représente le subconscient obscur, parengon de la mère ogresse, celle qui empêche sa progéniture d'achever son évolution et la pétrifie chaque fois qu'elle doit affronter sa peur. Donc en premier lieu, il est possible d'interprêter son histoire des méduses à sa femme comme sa peur identitaire.

 

 

Mais si la réflexion est poussée plus loin, il est possible de se référer aux méduses échouées, à la mythologie grecque et où la Méduse, n'est plus la créature marine, mais une gorgone mythologique. Cette symbolique particulière nous engage à chercher dans le mythe de Persée un trésor spirituel que permettrait le sacrifice de la Gorgone. Et le sens de ce trésor spirituel nous est révélé par le type particulier de sacrifice qui est imposé : la décapitation. Il faut en effet comprendre que, métaphysiquement, le sacrifiant et le sacrifié ne forme qu’un et que « tout sacrifice est en réalité un ‘sacrifice de soi-même’ par identification du sacrifiant à la victime ou à l’oblation ». Ainsi, Persée en tranchant la tête de la Méduse tranche symboliquement la partie mauvaise de sa propre tête, ce qu’avait parfaitement compris P. Diel par exemple, sans pouvoir néanmoins en tirer tout le sens symbolique traditionnel par refus de puiser aux sources métaphysique les clefs de la compréhension. Il est donc tout à fait clair ici que  notre tête, c’est notre moi, et se trancher la tête est l’abandon de soi, la négation de soi, l’abnégation.  Persée en tranchant la tête de la Méduse, en réalisant le sacrifice de l’ego, s’assure de ne pas devenir un tel porteur de chaos.

 

 

 

 

 

Par conséquent tel Icare, Riggan/Birdman transformé par son opération, prend conscience qu'il peut enfin s'élever plus haut, que cette quête de l'admiration n'est qu'un mirroir aux allouettes, il sait qu'il ne sera plus jamais le même, ni même apprécié pour son jeu de comédien, mais pour le sensationnel, aussi comme lui a conseillé Birdman, il ouvre sa fenêtre de chambre, et lorsque Sam revient avec des fleurs, voyant la fenêtre ouverte, elle sourit, car elle est la seule à avoir compris qu'il est libéré de ses entrailles. Cette scène de fin serait, à mon sens, une simple vision de Riggan, à partir du moment où il ouvre la fenêtre nous savons qu'il va sauter et mourrir, mais tel le phénix, pour sa fille il renaît de ses cendres, car il a libéré son âme de tout ce poids qui le pesait. Le sacrifice ayant été nécessaire, car tel Icare tentant d'atteindre sa liberté, sortant enfin de ce labyrinthe alambiqué à l'intérieur de son crâne entre céder à la tentation de la facilité, faire du sensationnel ou essayer d'être apprécier pour le fruit de son travail (les cieux), il se brûle les ailes en constatant que c'est le sensationalisme-superéalisme qui l'emporte, et non lui même. Il retombe tel une comète, et se suicide par la fenêtre (de mon point de vue attention). Un sacrifice spirituelle qui montre bien la définition claire des méduses échouées. La mauvaise part de lui est parti. Il est enfin libre spirituellement. La métaphore de la mort est bien présente, mais la rédemption de l'âme est accompli. Personnellement, je le considère à l'image d'un Dieu libre.

 

 

 

 

 

Le film BIRMAN en lui même est  une critique de tout ceci, mais se fait congratuler de Golden Globes et d'Oscars, montrant bien ce milieu fermé et hypocrite, qui aime la digression lorsque cela sert sa cause, bien pensant à donner des leçons de morales lors de leurs cérémonies faussement hypocrites, car ils auraient eux les moyens de changer les choses, mais cela ne correspond pas aux valeurs capitalistes et consumériste. 

 

 

Au final, ce film nous offre tout ce qui est possible d'avoir comme qualités intrinsèques en calomniant un système dont le succès l'acclame et le récompense. Là encore la boucle est bouclée, pour la bonne et unique raison qu'Inaritu a réalisé qu'il devait dans son cinéma se remettre en question, et à l'image de Keaton dans le film, prendre le risque de faire quelque chose de nouveau, car le talent et la réussite comme tout à chacun c'est aussi de savoir s' introspecter pour mieux évoluer. 


Birdman est donc un vibrant hommage à ce qu'on appelle le 7ème art, le cinéma par excellence, et le 6ème art le théâtre. Un film magistral parfaitement bien monté, critique acerbe d'une industrie cinématographique sous toute ses formes, en passe de perdre ce qui en a fait son essence, et critique d'une société de paraître où l'existentialisme prédomine sur l'humanisme. Un véritable chef d'oeuvre et une très belle leçon de cinéma. Micheal Keaton revient avec un rôle transfigurant sa carrière délaissé par l'industrie Hollywoodienne après ses 2 excellents BATMAN de Burton, et démontre un jeu d'acteur époustouflant. Quant à Edward Norton il joue un rôle en or pour un acteur talentueux, bluffant de justesse, de vérité et de rentre dedans que je n'avais pas ressenti depuis American History X, la 25ème Heure et Fight Club. Il tient ici un de ses meilleurs rôles. 

Merci Alejandro González Iñárritu de nous avoir délivré un chef d'oeuvre d'une telle intensité. Un de mes films rentrés directement dans mes films préférés. Une valeur sure avec un excellent 10/10.

 

 

Citation : les ailes ont la force de soulever le corps au-dessus de la Terre et de le conduire là où se tient la race des Dieux."

Inaritu se moque aussi des cérémonies de récompense, même si il accepte le jeu d'avoir gagner 4 oscars et 2 golden globes. Les résultats ont été très controversés et  pas forcément bien accueillis par le public. Ce qui est intéressant, pour Inaritu,  c'est de montrer que les récompenses cinématographiques peuvent être à contre courant  de que l'académie en général aurait souhaité. Ainsi, en 1994, le très controversé Quentin Tarantino reçut la palme d'or du meilleur film au festival de Cannes pour PULP FICTION. Film pourtant un tant soit peu outrageux (n'ayant pas peur de glorifier la prise de drogues et les règlements de compte entre truands stéréotypés), Pulp Fiction se fit huer à la remise de la Palme d'Or à Tarantino, et ce dernier leur a adressé un gros fuck. Le parallèle ici, est flagrant, le coup d'éclat de Riggan Thompson a fait changer d'avis la critique, tout ça pour une glorification amorale d'un suicide sur scène. Le personnage de Eddie pointant son arme sur le public comme vu dans le journal faisant référence à la mythique scène d'exécution de Jules Winfield dans Pulp Fiction. Inaritu se moque aussi des cérémonies de récompense, même si il accepte le jeu d'avoir gagner 4 oscars et 2 golden globes. Les résultats ont été très controversés et  pas forcément bien accueillis par le public. Ce qui est intéressant, pour Inaritu,  c'est de montrer que les récompenses cinématographiques peuvent être à contre courant  de que l'académie en général aurait souhaité. Ainsi, en 1994, le très controversé Quentin Tarantino reçut la palme d'or du meilleur film au festival de Cannes pour PULP FICTION. Film pourtant un tant soit peu outrageux (n'ayant pas peur de glorifier la prise de drogues et les règlements de compte entre truands stéréotypés), Pulp Fiction se fit huer à la remise de la Palme d'Or à Tarantino, et ce dernier leur a adressé un gros fuck. Le parallèle ici, est flagrant, le coup d'éclat de Riggan Thompson a fait changer d'avis la critique, tout ça pour une glorification amorale d'un suicide sur scène. Le personnage de Eddie pointant son arme sur le public comme vu dans le journal faisant référence à la mythique scène d'exécution de Jules Winfield dans Pulp Fiction.

Inaritu se moque aussi des cérémonies de récompense, même si il accepte le jeu d'avoir gagner 4 oscars et 2 golden globes. Les résultats ont été très controversés et pas forcément bien accueillis par le public. Ce qui est intéressant, pour Inaritu, c'est de montrer que les récompenses cinématographiques peuvent être à contre courant de que l'académie en général aurait souhaité. Ainsi, en 1994, le très controversé Quentin Tarantino reçut la palme d'or du meilleur film au festival de Cannes pour PULP FICTION. Film pourtant un tant soit peu outrageux (n'ayant pas peur de glorifier la prise de drogues et les règlements de compte entre truands stéréotypés), Pulp Fiction se fit huer à la remise de la Palme d'Or à Tarantino, et ce dernier leur a adressé un gros fuck. Le parallèle ici, est flagrant, le coup d'éclat de Riggan Thompson a fait changer d'avis la critique, tout ça pour une glorification amorale d'un suicide sur scène. Le personnage de Eddie pointant son arme sur le public comme vu dans le journal faisant référence à la mythique scène d'exécution de Jules Winfield dans Pulp Fiction.

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O
Bon, de Vodkaster à ton blog, j'y suis ! Quelle effort critique ! C'est long, détaillé et bien appuyé par de solides arguments.<br /> <br /> Je ne m'arrête que sur deux aspects. L'amour au centre de tout et au coeur des aspirations de chacun (et surtout des comédiens !). C'est aussi l'amour que recherche l'étourdissante Gloria Swanson dans Boulevard du Crépuscule et bien sûr cette flopée d'acteurs venus estomper un peu de leur lumière dans la Map to the stars de Cronenberg.<br /> <br /> La seconde chose, c'est le récit que tu écris qui traite de méduse. Tu me remets ce plan inaugural en tête, je l'avais oublié. Et tu éclaires parfaitement sa portée symbolique, de la méduse des mers à la méduse mythologique, Birdman n'est plus seulement Icare, il devient également (rôle après rôle, il reste certainement toujours une parcelle de personnage dans l'esprit du comédien) Persée. Persée triomphant, Icare prétentieux, Michael Keaton sublime.
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M
Bonsoir Joe D, bon alors je vais être honnête je n'ai pas eu le temps de tout lire parce que je suis vraiment débordé. Mais pour être honnête j'ai quand même lu la moitié et ta critique me donne envie de revoir pour me refaire un nouvel avis dés qu'il sortira dans les bacs. Donc merci pour ce joli pavé, et comme souvent tes analyses sont très convaincantes :) <br /> A plus ^^
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C
Salut Joe,<br /> Effectivement tes critiques sont de très bonne qualité, j'ai pris le temps de lire ta critique en rentrant aujourd'hui car je n'avais pas le temps hier soir vu que ta critique est très fournie ! Encore une fois une excellente critique très détaillée, de Icare à Pulp Fiction ! A bientôt Joe !
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S
Merci beaucoup Alex, j'essaye de faire du mieux que je peux. J'ai lu ta critique par ailleurs sur Skyfall, et je l'ai vraiment bien apprécié. Nous portons un peu le même regard sur cette saga je pense.
S
Je te remercie ma chère Mina. J'ai tellement adoré ce film atypique mais non moins dénué de beaucoup de symbolisme que je ne pouvais passer à côté d'une critique. Merci d'avoir laisser un commentaire. A très vite bisous. Joe (oui tu peux m'appeler ainsi, on se connaît depuis le temps).
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M
Merci bcp pour le lien :)
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M
Bonjour Selby :)<br /> Enfin, j'arrive à poster et comme je te l'ai dit : superbe critique analytique et de rajouter que la présentation de tes billets sont de belle qualité. Vivement de lire tes prochains avis. Bisous. Mina :)
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S
Je te remercie ma Mina, mais toi et 007Bond vous avez fait un superbe boulot aussi pour ce chef d'oeuvre qu'est Birdman. Film tellement atypique et exceptionnel que je ne pouvais pas passer à côté de ma phase analytique sur ce chef d'oeuvre. Gros bisous ma comparse cinéphile Joe (tu peux m'appeler Joe que Shelby tu me connais bien ;) )